Pope Francis

Thursday, 4 July 2013

Pour une solidarité sans frontières

Des personnes qui tentent désespérément d'atteindre un autre pays, fuyant les persécutions, les violations des droits humains, une guerre civile, ou qui sont simplement à la recherche de meilleures opportunités économiques pour faire vivre leur famille. Lampedusa est une île italienne à 110 kilomètres de la Tunisie, où la migration irrégulière et les migrations forcées sont une réalité. Ce phénomène concerne des êtres humains qui ont un visage, qui sont à la recherche d'un nouveau  départ, et qui se tournent vers nous et attendent une réponse de notre part.
Lampedusa n'est que l'un des nombreux carrefours sur la planète où confluent des mondes divers. En effet, l'itinéraire vaste et complexe des réfugiés s'étend  à ceux qui se dirigent en bateau vers l'Australie, le Yémen, l'Italie ou Malte; qui traversent en camion le désert du Sahara du Nord; qui parcourent à pied le désert du Mexique vers les Etats-Unis; qui franchissent les fleuves pour entrer en Afrique du Sud par le Zimbabwe ou qui quittent l'Afghanistan à travers la Turquie, vers la Grèce. Ces formes de flux migratoires sont un phénomène mondial.
La présence du Pape François à Lampedusa sera un signe puissant pour rappeler l'attention de tous et certainement pour communiquer que la bonne nouvelle de Jésus s'adresse à chaque vie et à chaque situation. Précisément comme le Pape lui-même l'avait dit: « N’oubliez pas la chair du Christ qui est dans la chair des réfugiés: leur chair est la chair du Christ » (Discours aux participants à l'assemblée plénière du Conseil pontifical pour la pastorale des migrants et des personnes en déplacement, 24 mai 2013). Le Christ est présent sur l'île dans ceux qui sont arrivés, mais également dans la population locale qui les accueille. A Lampedusa, comme partout dans le monde, les défis sont affrontés par la population locale, qui en est parfois submergée et qui doit accueillir de grands nombres de nouveaux venus inattendus. « Au fil des ans, innombrables sont les exemples d’altruisme et d’actions héroïques de la part de membres des Eglises locales qui ont reçu des personnes déracinées de force, parfois même aux prix de leurs vies et de leurs propriétés. Offrir l’hospitalité signifie repenser et revoir sans cesse les priorités » (Conseil pontifical pour la pastorale des migrants et des personnes en déplacement, document Accueillir Jésus Christ dans les réfugiés et les personnes déracinées de force, orientations pastorales, n. 84;  année 2013). Ce phénomène rappelle également l'attention sur ceux qui se prodiguent pour leur venir en aide. Le secours en mer est un événement habituel. Souvent, ce sont les pécheurs et les marins qui les premiers, mettent leur vie en péril  et vont au secours de ceux qui sont en danger sur des embarcations surchargées et en très mauvais état. Il y a plusieurs années, le prix Nansen pour les réfugiés a été remis à l'armateur, au capitaine et à l'équipage du porte-container norvégien MV Tampa, qui avait sauvé 438 demandeurs d'asile dans l'Océan indien. Les pécheurs italiens sentent l'obligation morale d'aider les personnes à la merci des flots, quoi qu'en disent les autorités. Voilà pourquoi il est significatif qu'à Lampedusa, les pécheurs et leurs barques accompagneront le Saint-Père au port. Cette solidarité en mer peut être un encouragement en vue d'améliorer le bien-être des demandeurs d'asile et des personnes déplacées, en dépit des coûts élevés pour les personnes concernées.
Toutefois, il faut s'interroger sur les comportements des gouvernements, en particulier en ce qui concerne les conditions et les lieux à l'intérieur du pays réservés à ces personnes déplacées. Il s'agit des confins extrêmes d'une nation, de camps de réfugiés dans le désert ou sur une île perdue loin de  la terre ferme. On se demande s'il ne serait pas plus adapté de les accueillir dans d'autres zones. Ces questions ne peuvent certainement pas être évitées par les gouvernements locaux.
Les réfugiés et les demandeurs d'asiles devraient voir leurs droits respectifs garantis. S'ils ont le droit de fuir pour sauver leur vie, on devrait également leur donner le droit d'avoir accès à l'asile dans le pays d'arrivée. En outre, tous les autres droits de protection devraient être appliqués. Le droit de libre circulation et le droit au travail doivent être appliqués et ultérieurement étendus. Les gouvernements devraient protéger ceux qui fuient les violences, les persécutions et les discriminations. Au cours des années, les Etats ont élargi le concept de réfugié afin de répondre au défi actuel, et la législation internationale a elle aussi changé, en assurant une plus grande protection aux personnes contraintes de fuir. Malheureusement, l'attitude actuelle de nombreux gouvernements apparaît contraire à ces décisions, même si les Etats ont quoi qu'il en soit l'obligation d'assurer une protection aux personnes en fuite.
Sauver des vies humaines, en restituant la dignité, en offrant une espérance et en apportant des réponses sociales et communautaires, est étroitement lié aux valeurs morales et à la vision chrétienne. Cette interaction avec la présence des réfugiés, des demandeurs d'asile et des personnes déracinées de force pourrait conduire à un renouveau ultérieur de l'Eglise, qui nous poussera hors de notre univers familier, vers l'inconnu, en mission, pour rendre témoignage du Seigneur. « Nous devons tous avoir le courage de ne pas détourner notre regard des réfugiés et des personnes déplacées de force, afin de permettre à leurs visages de pénétrer dans nos cœurs et les accueillir dans notre monde. Si nous savons écouter leurs espoirs et leur désespoir, nous comprendrons les sentiments qui les habitent » (op. cit., n. 120). La visite du Saint-Père pourrait être un nouveau début pour nous tous.

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